Il n’y a aucune crainte à avoir en consommant de l’eau du robinet dans le canton du Jura.

L’eau en bouteille est une aberration

Des campagnes d’analyses d’envergure menées dans le Jura en 2020 montrent que la qualité des eaux souterraines est globalement «excellente».

Des différences s’observent néanmoins d’une source à l’autre. Mais les traitements permettent toujours de rendre l’or bleu parfaitement consommable. Au vu de ces résultats, l’État lance même un appel à la population pour qu’elle privilégie l’eau du robinet à celle en bouteille.

Des réserves sont néanmoins émises dans le canton sur un manque de données concernant une baisse de l’utilisation de pesticides.

Il ne faut pas craindre de consommer l’eau du robinet dans le Jura. C’est en substance le message transmis par le canton hier. L’État s’appuie sur deux campagnes d’analyses de micropolluants dans l’eau souterraine réalisée l’année dernière. Pour rappel, toute l’eau potable provient exclusivement des eaux souterraines dans le canton du Jura, contre une part d’environ 80% pour le reste du pays.

Au total, 152 micropolluants (provenant de produits phytosanitaires, mais aussi de substances se retrouvant dans les eaux usées comme des médicaments) ont été analysés dans 85 ressources en eau, ce qui représente plus de 25 000 résultats d’analyse. Selon Christophe Badertscher, responsable cantonal du Domaine installations et activités humaines à l’Office de l’environnement (ENV), la dernière grande étude de ce type avait été réalisée il y a dix ans à l’échelle jurassienne.

Christophe Badertscher se réjouit de constater que durant ce laps de temps, même si certaines substances prises en compte ont changé, il n’y a pas eu d’évolution négative. En 2020, les résultats ont même montré que la qualité des eaux était globalement «excellente».

L’eau est traitée avant consommation. Des différences s’observent néanmoins entre les différents captages. Cela est notamment le cas des métabolites du très médiatisé chlorothalonil, interdit en Suisse depuis fin 2019. Les concentrations de ceux-ci dépassent parfois la valeur limite, reconnaît Christophe Badertscher. Mais c’est rare, rassure-t-il. Dans le Jura, la situation est bien meilleure que sur le Plateau suisse qui connaît une agriculture plus intensive.

Selon l’ENV, seuls quelques rares captages présentent une qualité de l’eau qui n’est pas satisfaisante à cause d’une concentration de micropolluants trop élevée. Deux sources en particulier sont concernées: celle de la Vendline (Vendlincourt) et celle du Betteraz (Porrentruy). L’Ajoie est la région la plus touchée, par ses grandes cultures, mais aussi par le fait que le terrain est plus vulnérable aux infiltrations d’eau dans le sol, relève Christophe Badertscher.

D’un point de vue exclusivement sanitaire, le collaborateur de l’ENV assure aussi que cela ne pose pas de problème. L’eau brute, prise telle quelle serait problématique, mais les captages sont équipés de traitements spécifiques, tel le charbon actif, et la surveillance de la qualité de l’eau distribuée est réalisée par les communes avec «grand professionnalisme».

Dans le Jura, les eaux distribuées ne dépassent que très rarement la valeur de 0,1 microgramme par litre exigée pour les micropolluants les plus toxiques. Cette valeur a été fixée au niveau fédéral en prenant beaucoup de précautions, observe en outre Christophe Badertscher.

Au vu de ces résultats, l’État a même souhaité lancer un appel assez inédit auprès de la population. Il lui demande de privilégier l’eau du robinet à celle en bouteille.

L’eau du robinet suffit. À l’heure où le Jura est en train de préparer son plan climat, il souhaite en faire plus pour l’environnement, note Christophe Badertscher. Une manière simple de le faire est ainsi d’inciter les gens à se détourner de l’eau en bouteille.

Alors que la grande distribution et des marques usent de messages tels que «Le plus important dans cette eau, c’est ce qu’on ne voit pas», le responsable jurassien du Domaine installations et activités humaines souligne que l’eau en robinet est tout aussi bonne.

Mais qu’en est-il justement de la concentration en sels minéraux vantée par l’industrie de l’eau en bouteille? Christophe Badertscher reconnaît qu’une petite part de la population peut avoir des besoins spécifiques en eau présentant une minéralisation particulière, mais que la grande majorité parvient très bien à subvenir à ses besoins en consommant l’eau du réseau.

Si l’on considère la production de bouteilles et le transport notamment, «l’eau en bouteille est une aberration écologique», estime-t-il même.

BENJAMIN FLEURY

Tous ces kms…

En fonction d’écobilans publiés par le magazine Bon à Savoir, l’État jurassien a calculé l’impact sur le climat de la consommation d’eau en bouteille. Considérant qu’un litre d’eau embouteillée produit, selon les cas, entre 154 et 302 grammes d’équivalent-CO2, soit bien davantage que l’eau du robinet (0,1 gramme), le canton estime que 4500 tonnes de CO2 seraient émises inutilement chaque année dans le Jura. Cela correspond à une voiture qui parcourt plus de 1000 fois le tour de la Terre. BFL

Source : LQJ – mercredi 3 mars 2021